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Abbé Jean Mercier (Pa 28), Fondateur de La Biffutière

Jean MercierNombreux sont les Gadzarts qui ont connu et fréquenté au groupe Cath’s de Paris Jean Mercier, Aumônier des Arts et Métiers entre 1946 et 1963.

Cet homme d’exception a marquĂ© plus d’un d’entre nous – catho ou non – et, aujourd’hui encore, cinq ans après son dĂ©cès, il continue Ă  servir de rĂ©fĂ©rence Ă  nos pensĂ©es, nos comportements ou nos actions.

Issu du quartier de Ménilmontant, passionné de trains dans son enfance, Jean Mercier entre aux Arts et Métiers en même temps qu’un de ses condisciples de l’Ecole Turgot, Pierre Ferry (Pa 28), son délégué de promo, récemment décédé.

Mais quelques années après l’obtention de son diplôme, il choisit L’EGLISE. Il lui reste alors une année à accomplir au grand séminaire avant d’être ordonné à la prêtrise lorsque survient la guerre en septembre 1939 et, pour lui, la mobilisation suivie de 5 années de captivité, de 1940 à 1945.abbe_jean-mercier

Durant cette période, il tente trois fois de s’évader (sans succès hélas !). Lors de sa troisième tentative, il est repris à Wissembourg, en Alsace, après avoir traversé, en marchant, toute l’Allemagne d’est en ouest. « Kein glück ! » (pas de chance !) lui a lancé avec respect l’officier allemand qui l’a arrêté.

De nombreuses années après la guerre, Jean Mercier rédigeait et imprimait un petit journal de souvenirs et d’échanges de nouvelles avec ses anciens compa¬gnons de captivité et avec lesquels il gardait aussi des liens directs très étroits.

Libéré en 1945, et après sa dernière année de séminaire enfin effectuée, il est ordonné prêtre à Notre-Dame de Paris par le cardinal Suhard, le 20 avril 1946. Il dira : « Ce fut le sommet de ma carrière. Le résultat de ce OUI à toutes les étapes fut toujours du bonheur ».

Immédiatement, l’Archevêque le nomme vicaire à la Paroisse Saint Marcel, Boulevard de l’Hôpital, pour y consacrer la moitié de son activité pastorale à l’Aumônerie des Arts et Métiers.

A cette époque, j’habitais le XIIIème arrondissement dans le même quartier que lui et, rapidement, il m’enrôla comme secrétaire de l’Association Catholique des Arts et Métiers (dont Jean Roulland (Pa 18) était alors le Président). Je rencontrais notre ami en moyenne deux fois par semaine et c’était un régal de travailler avec lui.

Après mon dĂ©part du XIIIème arrondissement pour la banlieue parisienne, en 1960, Jean Mercier – sur son initiative – et Jean Roulland achetèrent un local qu’ils nommèrent « La Bifutière ». SituĂ© au 14 rue Pinel, il permettait Ă  tous les Ă©lèves gadzarts parisiens, sans distinctions, de venir prendre le Bifut entre 12h30 et 13h30 – en n’ayant que la rue Ă  traverser en face des At’s – et aux cathos, ainsi qu’à d’au¬tres groupes tels que IngĂ©nieurs Sans Frontières, de s’y rĂ©unir selon leurs dĂ©sirs ou leurs besoins.

En 1963, l’Abbé Mercier fut nommé 1er vicaire dans une paroisse de Malakoff laissant, malgré lui, la charge de l’Aumônerie des A & M au Père Delavoye, remplacé à son tour par Georges Usselmann OFM (Pa 47).

De 1963 à 1966, Jean Mercier sera membre du Comité de la Société des Arts et Métiers. Il assiste à toutes les réunions mensuelles de sa promo et aux déjeuners annuels. En 1968, il devient Curé de Saint-Cloud, regroupant trois églises avec Stella Matutina et Notre-Dame des Airs ; il le restera durant 14 ans.

Serviteur de Dieu, toujours présent et ardent à la tâche à la tête des communautés qui lui ont été confiées (ce ne fut pas facile à Saint-Cloud, comme ailleurs, en 1968), Jean Mercier fut un serviteur effacé mais combien efficace. Les paroissiens de Saint-Cloud se souviennent encore du service rendu, à l’époque de SOLIDARNOSC, par leur Curé l’Abbé Mercier, avec toute une équipe, à la communauté polonaise de Jedrzejow, en lui envoyant, par camions, vêtements, médicaments et nourriture.

Monseigneur Sczymecki, évêque de Kielce, est venu ensuite à Saint-Cloud et l’a vivement remercié en le nommant chanoine de Kielce, pour s’être vraiment mis au service de la Pologne. J’étais personnellement présent à cette cérémonie.

En 1982, il entrera dans une retraite très active, restant à Saint-Cloud au service du nouveau Curé le Père Bonnefond, qui le remplaça.

Son sens du service rayonnera encore et il continuera de donner le tĂ©moignage d’un « prĂŞtre heureux ». C’est ainsi que, plein d’audace missionnaire, il compose un tract pour NoĂ«l 1992 et, Ă  80 ans, va le distribuer Ă  la gare de Saint-Cloud : « … Le bonheur est une denrĂ©e sublime, subtile et fugace. Il s’évapore quand on veut se l’approprier mais, si on le donne, il frissonne et grandit (c’est la seule chose que l’on peut donner sans l’avoir) … ».

Il est décédé le 5 mai 2002, à Saint-Cloud, où ses obsèques ont eu lieu 4 jours après, en présence d’une dizaine de prêtres, de l’évêque de Nanterre, Mgr Favreau, et de nombreux gadzarts.

Dans son testament, il demandait expressément que l’on ne prononce pas son éloge.

Il a été inhumé à Mohon (Morbihan). Je me suis rendu en 2004 sur sa tombe, où il repose très simplement avec ses parents.

Jean Mercier, mon grand ami, mon frère, mon modèle, réalisait en lui une synthèse, rarement rencontrée, de gran¬des qualités humaines et religieuses, ceci chez un être parfaitement équilibré. « La tête dans les étoiles, les pieds bien ancrés dans la terre ».

Il était un parfait gadzarts, réfléchi, dynamique, exigeant ou indulgent suivant les circonstances et les individus, sensible, dévoué à l’extrême, à l’aise dans tous les milieux, bien au fait des problèmes sociaux et d’un grand sens pratique, bricoleur en méca¬nique, photographie et astro¬nomie.

Outre sa grande modestie, n’oublions pas sons sens de l’humour qui nous amusait à chaque rencontre. Et n’ou¬blions pas non plus son souci pédagogique allié au sens de la formule. Je me souviens plus particulièrement de cette recommandation adressée à nos jeunes camarades : « Ne vous impatientez pas : le Bon Dieu n’est pas un ingénieur mais un jardinier ».

Aujourd’hui, son œuvre, La Bifutière, se porte bien. Son local est, année après année, fréquenté en grand nombre par les élèves de P3.

Deo gratias – Merci Jean, Merci l’AbbĂ©, Merci Père Mercier.

André Dommanget (Pa 44).